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Sébastien Jany : l’homme debout

Article paru dans RUGBY MAG n° 1157 (novembre 2016)

Sébastien Jany : l’homme debout

Grièvement blessé en 1996, à l’âge de 22 ans, Sébastien Jany a retrouvé sa mobilité au bout d’une année. Cet Isérois, toujours resté fidèle à sa région, accompagne désormais au gymnase ses deux filles, qui pratiquent le handball.

 Il habite Saint-Vérand, une commune de l’Isère située à quelques kilomètres de Saint-Marcellin, la ville où il est né il y a 42 ans. C’est dire si Sebastien Jany est attaché à sa région. C’est à l’âge de 14 ans qu’il a commencé à jouer au rugby sous les couleurs de… Saint-Marcellin Sports.

C’est le 7 janvier 1996 qu’il allait être victime d’un grave accident à l’occasion d’un match de Fédérale 2 entre Saint-Marcellin et Montmélian. « Je jouais numéro 8 depuis que j’étais en juniors. Avant d’attaquer le championnat, on m’a placé talonneur parce que je savais lancer en touche », explique-t-il. Il raconte: « Ce jour-là, sur une entrée en mêlée, le pilier droit adverse avait son lacet défait. Quand il se relève après l’avoir remis, le talonneur me prend et je n’étais pas prêt, j’étais haut sur mes appuis et pas allongé. J’avais les jambes droites et le dos à l’horizontale ». Sébastien se souvient être resté conscient. « J’ai eu la chance que personne ne me soit tombé dessus mais j’ai su tout de suite ce que j’avais. Je me voyais tourner avec un fauteuil roulant sur la piste d’athlétisme ».

Avec une fracture de la vertèbre cervicale C5 et une luxation de la C6, il est emmené à l’hôpital de Saint-Marcellin avant d’être transporté une heure et demie plus tard à Grenoble, à 50 kilomètres de là. « Le chirurgien m’attendait et j’ai été opéré dans les six heures ». Après quinze jours d’hospitalisation, il passera un an au centre de Saint-Hilaire du Touvet, en Isère. « Au départ, j’étais tétraplégique, je bougeais la tête et les bras mais pas les doigts. La sensibilité s’arrêtait à partir de la poitrine. C’est avec l’aide du bon Dieu et la force de caractère que m’ont apportée ceux qui venaient me voir que tout s’est bien synchronisé ». Au point de bouger un doigt cinq semaines après son accident, puis un orteil un peu plus tard. « On m’a dit alors qu’il y avait une personne tous les vingt ans qui récupérait de cette façon-là. Je suis sorti du centre fin décembre 1996, en étant debout après avoir laissé définitivement mon fauteuil à partir du mois de septembre ».

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 UNE RAIDEUR DANS LES JAMBES

 Sébastien Jany se souvient de la présence de son club à ses côtés. « Durant les trois premiers mois où c’était le plus dur, j’ai eu du monde tous les jours. Une fois, ils étaient 22 alors qu’il faut plus d’une heure pour aller jusqu’à Saint-Hilaire du Touvet. Après, j’en voyais chez moi, le week-end ». Sa famille l’a aussi beaucoup aidé. « J’étais à l’époque avec une copine qui est devenue ma femme et la mère de mes deux filles dont la plus jeune est née dix ans jour pour jour après l’accident ».

Aujourd’hui, Sébastien n’éprouve aucune difficulté particulière pour se déplacer. « Sauf sur des longues distances. J’ai une raideur musculaire dans la partie postérieure des jambes, ce qui fait que j’ai une marche un peu robotisée ». Mais il n’a pas totalement récupéré au niveau des mains. « Je n’ai pas une précision extrême, mais je peux écrire et me servir de l’ordinateur ».

Sébastien Jany ne s’est pas éloigné du rugby après son accident et c’est ainsi qu’il est devenu dirigeant de son club l’année suivante avant d’en devenir président en 1997-1998, pour une saison. Il pratique depuis quatre ans le rugby-fauteuil a Bourgoin sous le maillot du CSBJ et avoue ne pas être allé voir jouer Saint-Marcellin récemment « car j’accompagne mes filles qui font du handball et je tiens la table de marque ». Mais il suit les résultats du Top 14 et voit ses anciens partenaires. « Il y a aussi l’action de la Fondation Albert Ferrasse et je tire mon chapeau à ceux qui la font vivre. C’est énorme ! Ils ont su tirer la sonnette d’alarme grâce a une prise de conscience salutaire ». Il conclut : « A l’occasion de rassemblements de grands blessés, je m’aperçois que je suis l’un de ceux qui s’en tirent le mieux, j’ai eu de la chance dans mon malheur ».

Texte : Félix Chiocca – Photographe : Thiérry Chassepoux